Je l’avais déjà écrit lors de mon périple sur les traces du commandant, en 2015 (voir ici) ou le col des journaux en 2016 (ici) : la géographie des lieux est essentielle pour mieux comprendre un parcours. Ce 9 mai 2018, ce fut enfin l’occasion d’une première et rapide visite dans le Bugey, sur les traces du 133e RI, du commandant Barberot et de Louis Chevrier de Corcelles. Une visite décidée à la dernière minute, à l’occasion d’un jour de congé à prendre. Au programme : Belley, la traversée du Bugey, Ambutrix, Chazey-sur-Ain. Une visite qui en prépare d’autres, tant ces lieux restent à explorer. Que mes lecteurs familiers du Bugey ne soient pas surpris par mon récit, modelé par mes impressions notées à chaud tout au long du parcours.
En route pour Belley
Quittant le matin Paris pour Lyon par TGV, je rejoins Belley en voiture. J’ai dans mon sac la littérature de circonstance : un exemplaire de mon « Barberot », la revue des Nouvelles Annales de l’Ain sur l’année 1915, une version pdf du livre de Louis de Corcelles, et surtout l’ouvrage « Gertrude Stein, le Bugey, la guerre » de Dominique Saint-Pierre, dont les notes de bas de page fourmillent d’informations sur le Bugey et ses habitants pendant l’entre-deux-guerres.


Les hommes du 133e RI


En août 1914, le 133e régiment d’infanterie en garnison à Belley partit vers le front pour défendre la France.
Pour le centenaire, la ville avait organisé plusieurs commémorations, et Dominique Saint-Pierre avait notamment présenté l’histoire du régiment le premier mois de la guerre et le portrait de plusieurs de ses hommes, devant un public nombreux …
Traces dans la ville
A quelques dizaines de mètres du monument, contigu à l’hôtel de ville, je peux voir l’adresse qu’habitaient le commandant Barberot, sa femme et son fils à la veille de la guerre : 9 rue des capucins, aujourd’hui boulevard de Verdun. Pour moi, l’immeuble n’est pas d’époque, à moins que les numéros aient changé et qu’il ne s’agisse pas du même bâtiment. Une comparaison entre une carte postale ancienne et l’immeuble actuel montre trop de différences.
Poursuivant mon chemin, j’arrive sur la place des Terreaux. Les commerces, comme ailleurs, sont nombreux, y compris les cafés. Je me rappelle le nombre historique considérable (plus de cent) de cafés de la ville, stimulé par la présence du régiment, ainsi que la description qu’en fait le lieutenant-colonel Henri Quais dans son article « La vie de garnison à Belley à la Belle Epoque », parue dans Le Bugey n°69, 1982, page 320, mentionné dans l’ouvrage de Michel Perrier, Charles Vuillermet :
La place des Terreaux, ce centre de la ville, voit son intérêt grandir. Elle est devenue le déversoir de la caserne par ce cordon de la rue des Ursules, qui prolonge la rue du Faubourg Saint-Martin. Dans la journée, la ville est calme, c’est tout juste si dans le lointain on entend les sonneries du clairon qui jalonnent les activités de la caserne. Mais à 17 heures, le 133e s’empare de la ville, c’est le « quartier libre » jusqu’à 21 heures. La rue Saint-Martin égrène d’abord les officiers, magnifiques, en noir et rouge, le sabre au côté, puis les sous-officiers en groupes parfois. La troupe suivra de peu, retardée par l’inspection, devant la glace, du sous-officier de semaine et du poste de police de Sibuet. La tenue doit être impeccable sinon l’homme fera demi-tour sous l’injonction de l’adjudant de semaine. Peu à peu, c’est le flot qui dévale dans la rue, vers les boutiques, vers les cafés et il y en a cent quinze dans la ville !
Non loin de là, l’artère principale de la veille ville – la Grande Rue – démarre. Aménagé, le numéro 23 fut l’adresse de la veuve du commandant à sa mort, en 1961. Là, le bâtiment est bien d’époque.
Une vraie visite d’une bonne journée serait nécessaire pour retrouver les autres lieux. Madame Véronique Janéaz (voir ici le parcours de son arrière-grand-père) m’indique d’ailleurs le jour suivant un circuit possible :
- La forêt de Rothonne qui propose un circuit à travers ce qui fut un lieu d’entraînement du 133e RI.
- Le petit carré militaire situé dans l’îlot central du cimetière.
- La borne précisant le lieu du départ du 133, descendant rejoindre la gare en contrebas
On peut y rajouter l’ancien emplacement de la caserne Sibuet, la cathédrale, l’emplacement de l’ancien et célèbre restaurant Pernollet, la référence de Louis de Corcelles et certainement d’autres lieux … un projet futur.
Tentative au fort de Pierre-Châtel


De retour, c’est l’occasion de relire Histoire passionnante de la vie d’un petit ramoneur savoyard, de Joseph Laurent Fénix. Il raconte son arrivée au fort lors de son incorporation, un peu avant la guerre :
En arrivant à la caserne, on fait le triage de tous ceux qui arrivent et moi, avec une dizaine d’autres, on nous a amenés au fort Pierre Chatel, qui se trouve à plusieurs kilomètres de Belley. On est montés pendant plus d’une demi-heure ; au fort, il fallait passer sur un pont-levis et à l’intérieur il y avait beaucoup de bâtiments tout en pierre de taille avec un rez-de-chaussée seulement. Au fond, il y avait des casemates, c’est à dire un genre de terrasse, couverte d’une épaisseur de terre. Ce fort était complètement sur un rocher. Le Rhône passait au pied et il y avait plusieurs centaines de marches d’escalier creusées dans le roc. Il fallait descendre avec une lumière, car il n’y avait que quelques ouvertures de loin en loin et on arrivait au pied du Rhône. Et cent mètres plus loin, il y avait le joli pont de la Balme qui fut construit à ce moment-là, et dans ce fort, il y avait une église qui nous servait de réfectoire.
Le temps presse néanmoins et il faut repartir, direction Lagnieu, Ambutrix et Chazey-sur-Ain. Le tout en choisissant la traversée par la montagne…
Prochaine épisode : A la découverte du Bugey du 133e : Ambutrix (2)






Étant descendant de la famille Pic/Richard et Quais, je vous remercie pour cet article fort intéressant sur le 133e
Bonne continuation.
Bien cordialement
Bonsoir monsieur, merci pour votre commentaire. J’ai depuis récupéré l’article complet du lieutenant-colonel Quais, votre parent, très précieux sur la vie de Belley avant la Grande guerre. Bien à vous.