Les pertes du Linge dans les Annales de l’Est

A plusieurs reprises, ce blog a fait part des travaux d’Eric Mansuy sur les pertes du Linge : publication dans l’Alsace d’un article qui annonçait la remise en cause du nombre de 10 000 tués français (Bataille du Linge : combien de morts ?), présentation à Raon l’Etape des travaux (Conférence sur les pertes du Linge le 24 mars 2016) et surtout la publication d’une étude détaillée sur les pertes du 5e BCP au Linge (Les tués du 5e BCP au Linge, par Eric Mansuy). Sous le titre « Le Linge, un siècle après 1915, la numération des pertes », les Annales de l’Est, revue semestrielle publiée par l’Association d’historiens de l’Est et l’Université de Lorraine, viennent de publier dans leur dernier numéro la synthèse de ses travaux.

Après avoir rappelé l’impossibilité de faire un décompte précis, un historique des chiffres publiés montre pourtant une constante d’environ 10 000 pertes – tués, blessés, disparus – jusque dans les années ’70 (y compris dans les deux ouvrages d’Armand Durlewanger consacrés au Linge). La répartition n’est pas toujours donnée, mais elle se rapproche probablement du bilan que le général de Maud’huy faisait parvenir le 4 septembre 1915 sur les pertes de la 129e DI et 47e DI (avant la fin de la bataille…) : 9 661 pertes, dont 1 354 tués, 8 141 blessés, 166 disparus. Puis les pertes sont devenus tués dans un glissement sémantique, et ce nouveau chiffre s’est imposé aujourd’hui dans tous les articles et discours.

10 000 tués ? Le travail d’Eric Mansuy va tenter d’estimer le vrai nombre, à partir des différentes sources disponibles, dans une logique d’hypothèse haute et basse : Journaux de Marche qui donnent un premier chiffre brut ; archives du Service Historique de la Défense des unités engagés ; archives sanitaires ; croisement avec les données du site Mémoire des Hommes, nécropoles…

Ce qui fait toute la richesse de cette analyse est le travail de correctif sur les blessés qui meurent finalement de leurs blessures, et les disparus que Mémoire des Hommes permet ensuite de comptabiliser comme tués. Les écarts entre les sources se réduisent, les chiffres s’ajustent. Et d’obtenir in fine un nombre convaincant de tués, qu’aucune source n’avait pu établir jusqu’à présent :

Pertes totales : 12 052/12 421
dont tués : 3 587/3 675

Eric Mansuy publie donc un travail remarquable où il conduit son lecteur à travers les diverses sources avec une très grande clarté, et dont le résultat ne se résume pas simplement à contester le chiffre exagéré de 10 000 tués qui circule aujourd’hui. Il établit aussi pour la première fois un nombre que les contemporains avaient eux-aussi largement sous-estimé.

Si vous souhaiter accéder à l’article lui même, vous pouvez commander le numéro des Annales de l’Est par le biais de l’adresse courriel suivante : camille.crunchant@univ-lorraine.fr

Plan de l’article :

Quand les pertes étaient bel et bien des pertes
Comment circonscrire la recherche
Quant aux sources exploitées
Ce que révèlent les historiques et les JMO
D’autres archives pour un résultat
Qu’en conclure ?
Bibliographie et sources
Historiques d’unités
Journaux des Marches et Opérations d’unités
Archives du SHD
Archives du Val-de-Grâce

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